vendredi 12 août 2016

Le rapport du veilleur

Nouvelle publiée en 2014 sur le madtelier d'écriture (oui, c'est le même titre que la nouvelle précédente, sauf aux majuscules, elle vient de la même session où le titre était tiré par un générateur aléatoire, je trouvais ça marrant de faire deux textes très différents avec le même titre)
Publiée ensuite (toujours en 2014) dans Les Contes Roses vol. 1 (Éditions des Artistes Fous)

Le rapport du veilleur


« Monsieur Duclos, nous attendons votre coopération pour comprendre le déroulé des événements d’hier. Nous espérons de vous un rapport détaillé. »
Il y avait eu un cambriolage dans la soirée et Joël était le veilleur de nuit. Bien sûr la police voulait sa version des faits, après tout il était en faute. Mais l’inspecteur ne se doutait pas de ce que ce mot « rapport » rappelait au veilleur.

***

La soirée était calme et Joël distraitement en train de surveiller les caméras de surveillance après son tour de ronde avec le clébard. Pas de match à suivre à la télé, il avait décidé de passer un coup de fil à Julia ; ses charmes n’étaient pas donnés, mais elle le valait bien.
La nuit était tombée depuis longtemps quand la jeune femme arriva dans la zone industrielle et le visiteur nocturne dans son sillage. Joël l’invita, elle, à entrer après avoir pris la peine d’enfermer le chien dans la petite salle de repos attenante à celle de surveillance. Ce dernier était jaloux et avait tendance à aboyer en permanence quand il avait de la compagnie, utile pour protéger un entrepôt, moins pour s’envoyer en l’air.

À 22h, la langue de Julia tournait autour de la verge de Joël, le chien autour d’un fauteuil et le cambrioleur autour du périmètre. Les mains de Joël allaient le long du cou pour chercher ses seins, celles du l’intrus le long du grillage pour chercher une faille. Tous deux atteignirent leur objectif.
Moins de dix minutes plus tard, Joël entrait en Julia, le cambrioleur dans le bâtiment et le chien dans une nouvelle crise d’aboiements. Elle gémit, le chien également, le temps de reprendre sa respiration entre deux aboiements, mais pas l’alarme que l’inconnu s’était chargé de débrancher.

Le crochet s’immisçait dans la serrure, le doigt du veilleur dans l’anus de Julia. Puis il y eut le déclic, la dernière résistance avait fini par céder. L’arrière-salle venait de s’ouvrir et ils y pénétrèrent. De dépit que ses avertissements soient ignorés, le chien s’en alla au fond de la salle, dans sa panière, quittant la stature à quatre pattes pour s’allonger alors que la prostituée faisait l’opération inverse.
Le cambrioleur finit par trouver ce qu’il cherchait tandis que Joël s’en approchait et que Julia le feignait. Le chien de son côté ne cherchait plus rien, préférant céder à la somnolence.
Le veilleur finit par se retirer de la demoiselle et le visiteur de l’entrepôt. Ce dernier se répandit en auto-congratulations et celui qui était censé l’attraper en humeurs visqueuses sur la poitrine de la professionnelle.

Le cambrioleur mit le contact de sa voiture, Julia sa culotte et Joël du temps à sortir son porte-monnaie. Le premier fila sur les chapeaux de roue et la deuxième un bas en pestant. Rhabillée, la demoiselle tendit la main, Joël un billet et le chien, sorti de sa somnolence, une oreille. Enfin payée pour ses services elle s’en retourna à ses affaires et le veilleur à sa télé ; toujours pas de match au programme, mais des gymnastes en tenues moulantes faisaient l’article d’un nouvel engin de musculation.
Il grattait son entrejambe et le chien à la porte, le veilleur se décida donc à le libérer. Au tour de l’animal de se dégourdir. Il ouvrit la porte, ils étaient seuls et le chien calmé. Durant la ronde ce dernier réalisa que l’entrepôt avait été visité et Joël que sa carrière prenait un mauvais tournant.

***

« Monsieur Duclos ? Votre rapport ?
— Inoubliable.
— Pardon ? »
Ah oui, l’enquêteur attendait une réponse… mais probablement pas la version qui lui avait coûté un gros billet et son emploi.

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